Rejets toxiques de la Dépakine : Sanofi obligé de fermer son usine

Rejets toxiques de la Dépakine : Sanofi obligé de fermer son usine
Dépakine : fermeture d'une usine Sanofi rejetant des polluants
Par Cécilia Ouibrahim publié le
Journaliste
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Lundi 9 juillet dernier, l’association France Nature Environnement (FNE) a tiré la sonnette d’alarme dans un article publié sur Mediapart, pointant du doigt un rejet de fumées toxiques de l’usine Sanofi de Mourenx dans les Pyrénées-Atlantiques. Depuis, le site a été fermé et le gouvernement exige de nouvelles analyses.

Un groupe pharmaceutique en phase de nous rendre malades ? Après Bayer qui rachète Monsanto, Sanofi se retrouve aujourd’hui au coeur d’une crise environnementale. Le site de Mourenx, dans les Pyrénées-Atlantiques, qui emploie une quarantaine de salariés, a été fermé cette semaine. En Cause ? Des fumées toxiques et “des matières dangereuses à des taux astronomiques” qui s'échappaient de ses cheminées selon France Nature Environnement (FNE). Parmi ces produits nocifs pour la santé et l’environnement, du bromopropane, une substance cancérogène utilisée pour la fabrication de la dépakine. Si le scandale a été signifié le 9 juillet, le groupe Sanofi, quant à lui, serait au courant depuis six mois.

Des “écarts hallucinants” avec les normes autorisées

Alors que l’affaire secoue le bassin du Lacq, Sanofi a procédé lui-même aux contrôles prévus par la loi. Résultat : les rejets toxiques étaient 90 000 fois supérieurs aux seuils autorisés fin 2017 et en mars 2018, le bromopropane était 190 000 fois supérieurs. Des quantités hors norme à couper le souffle ! Mais le célèbre fabricant de la Dépakine n’a pas jugé utile de cesser cette production polluante ni d’alerter les riverains. La présence de ces substances cancérogènes serait pourtant connue depuis des mois ainsi que les “écarts hallucinants” pointés par l’association France Nature Environnement. Si le groupe pharmaceutique prétend que ces rejets ne présentent pas de risque sanitaire "inacceptable", le gouvernement attend les résultats d’analyses complémentaires faites par un laboratoire indépendant.

Bientôt une réouverture ? 

Sous la pression de l’Etat, le groupe agrochimique et pharmaceutique européen a annoncé lundi soir sa volonté “d’opérer les améliorations techniques indispensables à un retour à la normale”. Dans un communiqué commun, le ministre de la Transition écologique Nicolas Hulot et la ministre de la Santé Agnès Buzyn ont, quant à eux, précisé que “toutes les conditions en matière d’émissions et d’absence de risques pour les salariés et les riverains devront être réunies pour que l’Etat puisse autoriser une reprise de l’activité du site”. Sanofi ne pourra donc pas envisager la réouverture de l’usine de Mourenx tant qu’elle ne sera pas conforme en matière de rejets toxiques et de polluants. Ces émissions présentent des risques potentiellement graves pour la santé au vu des substances qui les composent, toutes issues de la pétrochimie. Selon l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS), le bromopropane, substance cancérogène à l’origine de la synthèse de la Dépakine, serait “très inflammable”, pourrait causer des “irritations des yeux, des voies respiratoires et cutanées” et “nuire à la fertilité et au fœtus”. 


Un scandale qui en appelle un autre

Sanofi traverse une crise sanitaire majeure. Et pour cause, cette alerte rouge environnementale se cache derrière une polémique autour d’un médicament déjà en ligne de mire : la Dépakine. Composé de valproate de sodium, ce traitement anti épileptique est connu pour avoir provoqué de graves conséquences dont des malformations, des retards mentaux ou des cas d'autisme chez les enfants dont les mères prenaient ce médicament enceintes. Selon l’Assurance Maladie et l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), plus de 14.000 femmes enceintes y ont été "exposées" entre 2007 et 2014 et près de 30.000 enfants ont été victimes de troubles mentaux.  Alors que le Canard enchaîné accusait en 2016 le ministère de la Santé d'avoir gardé le silence, ce scandale a pris une nouvelle dimension.