Le chef indien Raoni chez le pape, super défenseur de l'Amazonie
Le chef indigène Raoni a rencontré lundi le pape François, grand défenseur de l'Amazonie, qui sera au coeur d'une réunion mondiale de l'Eglise à l'automne.
En tournée européenne, le chef Raoni veut alerter sur la déforestation de l'Amazonie et tente de collecter un million d'euros pour la protection de la réserve de Xingu, au Brésil, face aux menaces que font peser sur elle les exploitations forestières et les industries agroalimentaires.
Le Vatican n'a pas communiqué sur la rencontre, se contentant de diffuser des photos où l'on voit les deux hommes échanger des cadeaux et le pape serrer Raoni dans ses bras. Le pontife argentin s'était rendu en janvier 2018 à Puerto Maldonado, cité rurale du sud-est du Pérou entourée de la jungle amazonienne, où avaient convergé des milliers d'indigènes péruviens, brésiliens et boliviens.
"Probablement, les peuples autochtones amazoniens n'ont jamais été autant menacés sur leurs territoires", avait alors noté François. Il avait aussi dénoncé "la forte pression des grands intérêts économiques qui convoitent le pétrole, le gaz, le bois, l'or, les monocultures agro-industrielles".
Pour le pape, ce premier voyage en Amazonie avait constitué un puissant coup d'envoi aux préparatifs de l'assemblée mondiale des évêques (synode) d'octobre 2019, consacrée à cette forêt qui occupe 43 % de la superficie de l'Amérique du Sud et où vivent près de trois millions d'indigènes.
Poumon vert
L'Eglise catholique est consciente de l'histoire sanglante de l'évangélisation de l'Amérique latine au XVIe siècle et reconnaît qu'elle n'a pas toujours traité avec respect les peuples d'Amazonie. Mais elle est aujourd'hui engagée dans de nombreux projets pour aider les peuples amazoniens à préserver leurs coutumes et leur identité.
L'Amazonie abrite 20 % de l'eau douce non gelée de la planète, 34 % des forêts primaires et 30 à 50 % de la faune et la flore du monde. Ce poumon vert se répartit sur neuf des 12 pays de l'Amérique du Sud, en premier lieu le Brésil (67 %), la Bolivie (11 %) et le Pérou (13 %).
Dans son encyclique "Laudato si", son texte à tonalité très sociale sur l'écologie, le pape a dénoncé l'exploitation de la forêt amazonienne par "d'énormes intérêts économiques internationaux".
"Opposition de gauche"
Il a aussi souligné que la terre n'était pas un simple bien économique pour les communautés aborigènes, mais aussi "un endroit où reposent leurs ancêtres, un espace sacré avec lequel elles ont besoin d'interagir pour soutenir leur identité et leurs valeurs".
A Rome et surtout en Amérique du Sud, les préparatifs battent leur plein pour le synode sur l'Amazonie qui se déroulera au Vatican du 6 au 27 octobre. En amont, l'Eglise a souhaité écouter directement les doléances des peuples indigènes.
Quelque 260 points d'écoute ont été organisés à travers le gigantesque territoire, a détaillé le secrétaire exécutif du Réseau ecclésial pan-amazonien (REPAM), Mauricio López, lors d'un colloque organisé à la mi-mai à Rome.
Et quelque 87.000 indigènes, faisant partie de 140 des 390 peuples d'Amazonie, y ont participé, en compagnie de la plupart des évêques de la région.
"L'Amazonie constitue un point d'équilibre pour toute la planète", fait valoir le cardinal brésilien Claudio Humes, président du Repam, en charge du synode. "Nous sommes devant une crise vraiment grave, confirmée par la COP21 à Paris".
"La triste réalité, c'est que 20 % de l'Amazonie a déjà été déboisée", renchérit le cardinal péruvien Pedro Ricardo Barreto Jimeno, vice-président du Repam.
Le président brésilien d'extrême droite Jair Bolsonaro "s'est montré très opposé au synode" et considère la conférence épiscopale brésilienne comme une composante de "l'opposition de gauche", regrette le cardinal Humes, qui assure que les missionnaires en Amazonie sont simplement à l'écoute des plus pauvres.
Depuis son arrivée au pouvoir en janvier, M. Bolsonaro a affaibli ou supprimé le financement d'organismes de protection des indigènes et a confié leur responsabilité au ministère de l'Agriculture, dirigé par un ex-leader de l'agro-business.
Photo : © Handout - VATICAN MEDIA/AFP