Notre-Dame de Paris : le quartier contaminé au plomb

chantier Notre-Dame de Paris
Notre-Dame de Paris : le quartier contaminé au plomb
© STEPHANE DE SAKUTIN / POOL / AFP
Par Elodie-Elsy Moreau publié le
Rédactrice en chef
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Près de quatre mois après l’incendie de la cathédrale de Paris, les riverains s’inquiètent pour leur santé, les niveaux de plomb relevés dans certains lieux étant élevés.

Si après l’incendie de Notre-Dame, la principale question des riverains portait sur la reconstruction de la cathédrale, aujourd’hui ces derniers se focalisent sur leur santé. En effet, depuis le sinistre survenu le 15 avril dernier, les questions sanitaires se multiplient. Plusieurs centaines de tonnes de plomb contenues dans la charpente de la flèche et la toiture ont fondu et se sont répandues sous forme de particules. Or, une exposition aiguë ou chronique à cette substance toxique provoque une intoxication, appelée saturnisme. Et comme le précise l'Organisation mondiale de la santé (OMS), "il n'existe pas de concentration dans le sang qui soit sans danger".

Enfants et femmes enceintes, en première ligne

Inhalé ou ingéré, ce métal se diffuse pour atteindre le cerveau, le foie, les reins et les os. L'intoxication entraîne des troubles digestifs, une perturbation des reins, des lésions du système nerveux ou des problèmes de fertilité. Et les plus jeunes sont les plus vulnérables. Même des concentrations sanguines faibles "peuvent affecter l'intelligence de l'enfant et entraîner des problèmes comportementaux et des difficultés d'apprentissage" indique l’OMS.

En France, depuis 2015, on parle de cas de saturnisme au-dessus d'un taux dans le sang (plombémie) de 50 µg/l.

Jusqu’à présent, 162 enfants habitant près de Notre-Dame ont été testés pour contrôler le taux de plomb dans leur sang. Selon le dernier bilan de l'Agence régionale de santé d'Ile-de-France (ARS), publié mardi, 146 se situent sous le "seuil de vigilance" (25 à 50 microgrammes de plomb par litre de sang), 16 se situent à l'intérieur de ce seuil, et 2 dépassent le seuil de déclaration obligatoire de saturnisme (50). L'un de ces deux cas était déjà connu. Toutefois, sa contamination est liée au balcon de son logement et non à l’incendie. L'autre enfant est scolarisé dans un groupe scolaire situé rue Saint-Benoît (VIe arrondissement), fermé fin juillet en raison d'une concentration élevée de plomb dans les cours extérieures. Toutefois, à ce stade, les experts ne peuvent certifier que ce cas est dû au sinistre.

"Toutes les personnes dont les taux se situaient dans l'intervalle de vigilance (25-50 microgrammes) ont fait l'objet d'un suivi spécifique renforcé, au-delà des exigences réglementaires", a indiqué l'ARS. Cela consiste en "une analyse individuelle par des médecins spécialistes du Centre antipoison et de toxicovigilance" permettant "d'orienter le suivi médical qui doit être ensuite organisé par le médecin traitant".

Ecoles fermées jusqu’à nouvel ordre

L'Agence régionale de santé (ARS) estime à 5.000 µg/m2 le niveau de pollution au plomb que l’on peut retrouver dans les rues de la capitale. Mais dans certains quartiers, ce seuil a été dépassé. Ainsi, des mesures ont été mises en place dans les établissements scolaires situés dans un rayon de 300 m autour de ces lieux.

Au total, selon la mairie de Paris, une quinzaine de crèches et d'écoles situées dans les environs de la cathédrale font l’objet d’un nettoyage renforcé. En juillet dernier, Arnaud Gauthier, sous-directeur de la santé à la mairie de Paris, avait indiqué lors d’une conférence de presse qu’"aucune crèche ou école ne rouvrira s'il y a un risque".

Toutefois, le problème devrait être résolu d’ici la rentrée. Anne Souyris, adjointe à la mairie de Paris chargée de la Santé, a annoncé ce lundi au cours d’une conférence de presse que la rentrée pourra se faire sans "aucune ombre au tableau". 

"Nous avons décidé qu'à la rentrée les choses seraient rentrées dans l'ordre et que la dépollution devait être une réalité pour toutes et pour tous quand les Parisiens reviendront en septembre", a-t-elle ajouté.

Quelles précautions pour les ouvriers du chantier ?

Si la santé des enfants et femmes enceintes est au cœur des débats, celle des ouvriers travaillant à la reconstruction l’est aussi. En effet, le chantier de la cathédrale a été suspendu fin juillet, suite aux très hauts niveaux de plomb mesurés sur le parvis et à l'intérieur du monument. Alors que les travaux doivent reprendre progressivement à partir de la semaine prochaine, de nouvelles mesures de protection pour les travailleurs seront mises en place, a prévenu la préfecture d'Ile-de-France, le 2 août dernier.

De plus, une opération de dépollution est prévue. Un gel sera déposé sur deux rues adjacentes et le parvis. Le but ? Permettre l'aspiration des particules de plomb présentes. L'application de la couche devrait durer un jour. Elle séchera pendant trois jours et sera ensuite retirée progressivement. Ce processus devrait prendre au moins cinq jours. 

L'autre méthode, l'utra-haute pression avec ajout de tensioactif -un agent chimique permettant d'augmenter les capacités d'étalement et mouillage d'un liquide- a été rajoutée pour certaines des surfaces contaminées. Ce tensioactif sera aspiré et récupéré. Cette solution devrait être plus rapide que celle du gel.  

Lundi 5 août, des syndicats et des associations ont demandé la mise sous cloche de Notre-Dame pour éviter toute pollution. Mais pour la mairie de Paris, "un problème de faisabilité" compromet cette option.

Avec AFP/Relaxnews