Les OGM par mutagénèse, nouvelle stratégie des firmes de biotechnologie
Déjà présentes dans les cultures, les plantes « mutées » sont de vrais OGM. Elles échappent pourtant aux règlementations européennes et arrivent en force avec leur cortège de brevets et pesticides. De cette réalité émerge une vraie question : quel modèle agricole voulons-nous ?
Depuis 2008 et 2012 de nouvelles variétés de tournesol et de colza sont apparues en France. Leur particularité : elles ont été rendues tolérantes aux herbicides par la technique de mutation génétique ou mutagénèse. Lors de l’épandage, l’herbicide spécialement conçu pour la plante peut pénétrer dans ses cellules sans la détruire, alors qu’il tuera tous les végétaux alentour.
Des OGM direz-vous ? Oui ! Nous sommes effectivement dans le même scénario que pour les plantes transgéniques telles que le colza Round Up Ready de la firme Monsanto par exemple, ou le maïs TC1507 de Pioneer.
Une différence de taille : les semences des plantes mutées arrivent sur le marché sans aucune mention des manipulations génétiques qu’elles ont subies. Pas d’étiquetage : agriculteurs, consommateurs, personne n’a accès à l’information.
Interrogé par l’association Infogm, le ministère de l’agriculture a déclaré que 17000 ha de colza et 10000 ha de tournesol obtenus par mutagénèse ont été plantés en France en 2014.
Cela n’aurait pas été possible pour les plantes transgéniques qui sont soumises à la directive européenne 2001/18. Celle-ci prévoit que, avant de pouvoir être commercialisés, les OGM transgéniques doivent être évalués, autorisés et étiquetés. Chaque État peut prendre une restriction nationale. C’est le cas de la France, la Suisse et la Serbie qui ont interdit la culture de toutes les plantes transgéniques.
Une différence de taille : les semences des plantes mutées arrivent sur le marché sans aucune mention des manipulations génétiques qu’elles ont subies. Pas d’étiquetage : agriculteurs, consommateurs, personne n’a accès à l’information.
Interrogé par l’association Infogm, le ministère de l’agriculture a déclaré que 17000 ha de colza et 10000 ha de tournesol obtenus par mutagénèse ont été plantés en France en 2014.
La différence entre la transgénèse et la mutagénèse est parfois mince. Dans les deux cas, il s’agit de modifier la plante pour lui donner de nouvelles propriétés.
Pour faire court, disons que dans le cas des OGM transgéniques, le génome est modifié par introduction du gène d’un autre organisme : plante, ou animal.
Dans le cas d’une plante mutée, la modification du génome est intrinsèque. Les techniques les plus anciennes ont une trentaine d’années. Elles opéraient par exposition à des agents chimiques ou des rayons. L’évolution actuelle de la technique (par oligonucléotide) prévoit d’introduire des séquences d’ADN synthétisées en laboratoire dans le génome de la plante.
Tournesols (©DR)
Pour la transgénèse comme pour la mutagénèse, il s’agit bien de « modifier le matériel génétique de la plante d’une manière qui ne s’effectue pas naturellement par multiplication et/ou par recombinaison naturelle ». Ce sont les termes de la directive européenne 2001-18 qui classifie donc les deux techniques dans la catégorie OGM.
Mais, et c’est là que le bas blesse, les plantes mutées sont exclues du champ d’application de la directive ! Pas d’évaluation, pas de demande d’autorisation, pas d’étiquetage obligatoire. Un vide juridique total qui permet aux semenciers Pioneer et BASF notamment de s’imposer dans les cultures sans que quiconque ne soit informé.
L’appel de Poitiers
S’alarmant de cette réalité, un réseau d’associations soutenu par les signataires de l’appel de Poitiers est passé à l’action. Après plusieurs rendez-vous avec les ministères de l’agriculture et de l’écologie, les associations ont envoyé en décembre 2014 un courrier au premier ministre Manuel Valls. Sans réponse de ce dernier, en mars dernier neuf d’entre elles ont déposé un recours juridique en Conseil d'État. Leur demande à l’état français : installer un moratoire sur les variétés rendues tolérantes aux herbicides et interpeller l'Europe pour leur intégration dans la réglementation des OGM.
Sources :
• Christophe Noisette, Membre fondateur et rédacteur en chef d’Infogm.
• Christian Vélot, Chercheur en génétique moléculaire.
• Guy Kastler, agriculteur, chargé de mission de l’association Nature et Progrès, coordinateur du réseau Semences paysannes.