Des experts de l'ONU réclament la fin des pesticides
Des experts de l’ONU alerte sur les conséquences de l'utilisation des pesticides dans un nouveau rapport. Les chercheurs souhaitent mettre fin à l’agriculture industrielle et élaborer un traité mondial pour promouvoir l'agriculture biologique.
Un rapport publié par deux experts de l'ONU lèvent le voile sur l'impact des pesticides sur la santé ainsi que l'environnement et réclament un traité international qui promeut l'agroécologie.
Le mythe des pesticides
Pour justifier l’utilisation à grande échelle de leurs produits toxiques, les lobbies jouent la carte de la sécurité sanitaire. Selon l’affaire des “Monsanto Papers”, la firme américaine s’inquiétait, déjà en 1999, du potentiel mutagène du glyphosate, principe actif de son produit phare (et le plus utilisé au monde): le Round Up. Pour ne pas passer à côté d’un marché pesant 50 milliards de dollars par an, les lobbies ont véhiculé un mythe : sans pesticides, impossible de nourrir la population mondiale qui pourrait passer 7 milliards aujourd’hui à 9 milliards en 2050.
“L’utilisation de plus en plus de pesticides n’a rien à voir avec la réduction de la faim dans le monde”, précise le rapport.
Or, c’est argument est faux et c’est ce que prouve le rapport sur le droit à l'alimentation présenté le 8 mars au conseil des droits de l’homme des Nations unies qui accuse les multinationales (Bayer, Monsanto, Syngenta) d’occulter les risques sanitaires et environnementaux liés à l’usage de ces produits toxiques. Pour les auteurs du rapport, Hilal Elver et Baskut Tuncak, l’argument démographique pour justifier l’utilisation de pesticides n’est pas valable :
“Selon la FAO (l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture), nous pourrions nourrir 9 milliards de personnes aujourd’hui. La production augmente, mais les problèmes demeurent la pauvreté, les inégalités et la distribution”.
À l’inverse, les auteurs du rapport dénoncent que “les entreprises ne travaillent pas pour la réduction de la faim, elles travaillent pour une croissance de l’activité agricole à grande échelle”. Cette agriculture intensive n’est pourtant pas destinée à nourrir les populations locales et vulnérables mais accroître la rentabilité des multinationales. Pire encore, les cultures comme l’huile de palme ou le soja engendre une déforestation massive, une destruction de la biodiversité, l’exploitation des populations locales.
“Des impacts catastrophiques”
Les experts de l’ONU tirent la sonnette d’alarme. Selon eux, 200 000 décès seraient causés par les pesticides chaque année. Hilal Elver et Baskut Tuncak expliquent qu’il existe “un lien entre une exposition régulière aux pesticides et la maladie d’Alzheimer, la maladie de Parkinson, les troubles endocriniens, les troubles du développement et la stérilité. Les pesticides peuvent aussi avoir de nombreuses répercussions sur le plan neurologique, comme des pertes de mémoire, un manque de coordination ainsi qu’une acuité visuelle et des habiletés motrices réduites. L’asthme, les allergies et l’hypersensibilité en sont d’autres effets possibles”. Une liste aussi longue qu’effrayante et qui ne s’arrête pas aux impacts sur la santé publique.
L’environnement est tout autant impacté puisque l’usage excessif et abusif de pesticides entraîne la contamination des sols, la pollution de l’eau et de la diminution de la valeur nutritionnelle des aliments. Il provoque également une réduction de la biodiversité et la destruction de populations d’insectes. Selon le rapport, 50% du déclin des abeilles est imputé à l’utilisation massive des pesticides et notamment aux néonicotinoïdes, insecticides les plus utilisés au monde.
Favoriser une agriculture biologique
Selon le rapport, les législations ne protègent ni l’homme, ni l’environnement. Compte tenu du constat alarmant, Hilal Elver et Baskut Tuncak suggère un traité mondial pour remédier aux graves lacunes dans la protection des droits de l’homme. C’est pour cette raison qu’ils suggèrent de promouvoir l’agroécologie, de donner la priorité aux solutions écologiques et de favoriser une agriculture biologique.
À termes, l’objectif est de renoncer à l’agriculture industrielle et à l’usage des pesticides notamment en pénalisant les multinationales via des “taxes, de droits d’importation et des redevances sur ces produits”. Compte tenu de la puissance du lobbying, il est difficile de mettre toutes ses espérances dans ce rapport. Pour autant, le voile est levé et l’agriculture biologique progresse.