Caminando, l'école qui enseigne la nature et le vivre-ensemble
Dans la Drôme, une école primaire place la nature et le vivre-ensemble au coeur des enseignements au même titre que les disciplines du français et des maths. Potager, nichoir et mares sensibilisent les enfants à la biodiversité et à la collectivité.
Située non loin de Die, dans la Drôme, Caminando est une école primaire qui place la nature au cœur de son système d’enseignement depuis 2013. Accueillant une vingtaine d’enfants du CP au CM2, elle propose une autre façon d’apprendre qui repose sur l'environnement et l'individu sans pour autant négliger les fondamentaux des programmes pédagogiques de l’Éducation nationale. Entretien avec Muriel Fifils, fondatrice et directrice de l’école.
Un enseignement plus concret
“Quand mes enfants sont entrés à l’école primaire, j’ai eu l’impression que rien n’avait changé depuis mon époque, qu’elle n’avait pas évolué depuis 40 ans alors que le monde est en pleine transition”, voilà le constat qui pousse Muriel Fifils a proposé une école alternative. Alors qu’il est admis qu’il y a un âge propre à chaque enfant pour apprendre à parler et à marcher, il n’en en est pas de même pour l’apprentissage de la lecture, de l’écriture et du comptage. “Cette norme m’a posé une interrogation. J’avais adoré l’école primaire mais est-ce normal que, pour certains enfants, ce soit un véritable enfer et pour que finalement, on ne se souviennent plus de ce qu’est un adjectif qualificatif épithète, une fois adulte ?”.
Muriel Fifils a donc fondé une école qui repose aussi bien sur les programmes d’enseignement officiels que sur des enseignements concrets ancrés dans la nature, la communication non-violente, le vivre-ensemble et l’empathie.
“Notre enseignement repose sur comment être bien soi-même, comment être bien avec les autres et comment renforcer son lien à la nature.”
À la fin de la primaire, les enfants ressortent avec le même bagage que les élèves de l’école publique et peuvent poursuivre normalement leur scolarité au collège.
Au plus proche de la nature
Deux après-midi par semaine, les enfants s’occupe du potager : de la production maraîchère et du jardin avec serre qui disposent d’une partie collective ainsi que d’une partie individualisée propre à chaque enfant. Ils prennent également soin de la nature et cela passe par le paillage pour l’hiver, le soin aux animaux et la préservation des plantes. Dans le cadre des “sciences expérimentales” qui sont aux programmes officiels, les élèves de Caminando, eux, observent les oiseaux et les insectes ou explorent les berges de la rivière."C’est un support pédagogique formidable", explique Muriel Fifils.
Une organisation autonome et solidaire
L’école a été créée sur la base de la participation et du don de soi. Sur place, les enfants sont responsables de l’intendance (ménage, vaisselle, fournitures de classe) et fabriquent leur pain. Les enfants s’occupent du potager de l’école qui leur fournit des légumes bio et participent à la préparation des repas.
Les élèves sont responsabilisés mais les parents le sont tout autant. La cantine fonctionne en don : les parents volontaires se relaient pour préparer les repas pour les 19 enfants. Ce qui leur permet de bénéficier de 19 jours de repas pour leurs enfants. Les frais mensuels de scolarité s’élèvent, eux, à 180 euros.
“Aujourd’hui, la transimission des savois a changé. Les enfants ont accès à l'information sur Google. Il faut donc enseigner autrement. La vraie question c'est comment le faire et comment le faire ensemble ? Comme nous le susurre Edgar MORIN, aujourd’hui il s’agit autant d’enseigner à vivre* que d’enseigner les seules matières académiques ”.
À travers un modèle éducatif au plus proche de la nature et de la collectivité, Caminando sensibilise à l’écologie dans un monde en pleine transition.
Plus d'informations sur le site de l'école Caminando.
Pour aller plus loin :
* Enseigner à vivre, Manifeste pour changer l 'éducation, Edgard Morin,éd. Actes Sud, 2014, 16€.
Edgar Morin prône une refonte profonde de l’éducation, centrée sur sa mission essentielle telle que l’envisageait Rousseau : enseigner à vivre. Il s’agit de permettre à chaque individu d’acquérir une autonomie, de se prémunir contre l’erreur et l’illusion, de pratiquer la compréhension d’autrui, d’affronter les incertitudes, en somme de le préparer à affronter les problèmes du “vivre”.