Total veut remplacer l’essence par un bio-carburant à l’huile de palme
Le gouvernement s'apprête à donner le feu vert à Total pour la fabrication en France de biodiesel à partir d’huile de palme. Un projet qui fera exploser la demande et ravagera des forêts entières à l'autre bout du monde.
550.000 tonnes par an
Greenpeace France et les Amis de la Terre se sont procuré un document émis par la préfecture des Bouches-du-Rhône, détaillant le plan d’approvisionnement de Total pour sa bioraffinerie géante de La Mède. Les chiffres évoqués dans ce document sont très importants : pour alimenter cette bioraffinerie de La Mède, ce sont 550 000 tonnes d’huile de palme qui seront importées chaque année. Le groupe pétrolier français compte mettre en service cette bio-raffinerie cet été.
Le document indique que "le plan d’approvisionnement en huiles de l'établissement est, en première approche, ainsi constitué: 100 kilotonnes par an d’huiles alimentaires usagées ou de graisses animales", "100 kilotonnes par an de produits acides issus du raffinage d’huiles végétales" - de l'huile de palme selon le document - et "450 kilotonnes par an d’huiles de palme brutes".
“Ce projet fera bondir les importations françaises d’huile de palme de 64% et démontre l’incohérence totale du gouvernement français” dénoncent les ONG.
À titre de comparaison, environ 136 000 tonnes d’huile de palme alimentaire sont consommées chaque année en France. La France s’apprête donc à autoriser l’importation massive d’un produit destructeur pour les forêts d’Indonésie et de Malaisie notamment.
Une logique difficile à comprendre
Cette décision va à l’encontre de toute logique au moment où la France est censée construire une stratégie solide pour lutter contre la déforestation importée. Nicolas Hulot avait déclaré l'année dernière vouloir “fermer une fenêtre qui permettait d'incorporer de l'huile de palme dans les agrocarburants”. Quelques mois plus tard, il s'apprête à les faire rentrer par la grande porte.
Rappelons que ce type de biodiesel serait responsable de trois fois plus d’émissions de gaz à effet de serre que les carburants fossiles. L’impact sur l’environnement serait catastrophique. En effet, l’approvisionnement en huile de palme entraîne en Malaisie et en Indonésie une déforestation fragilisant l'écosystème, menaçant les rhinocéros, orangs-outans et tigres et affectant des populations locales.
"Le projet, qui fera bondir les importations françaises d’huile de palme de 64%, démontre l’incohérence totale du gouvernement français", dénoncent Greenpeace et Les Amis de la Terre dans un communiqué commun. Face aux critiques, Total s'engage à se fournir en huiles de palme "labellisées", selon ce document. Ces systèmes de certification sont toutefois jugés insuffisants par des ONG et des industriels.
Une consultation publique d’un mois débutera bientôt sur le sujet de la stratégie française de lutte contre la déforestation importée. Les ONG militantes demandent au gouvernement d’en finir avec ce double discours néfaste pour la lutte contre la déforestation et la protection du climat.
L’avenir incertain des biocarburants
Le ministre de la Transition écologique, Nicolas Hulot, veut mettre fin à l'importation des produits forestiers ou agricoles contribuant à la déforestation dans le monde. Selon Sylvain Angerand, des Amis de la Terre, "les prochaines semaines sont décisives car l’Europe est en train de réviser sa politique de soutien aux agrocarburants".
Les députés européens ont voté en janvier pour une suppression progressive de l'huile de palme dans les biocarburants d'ici 2021. Ce vote, qui n'est pas contraignant, doit faire l'objet d'une négociation avec le Conseil européen et la Commission. L'utilisation de l'huile de palme dans des secteurs comme la nourriture ou les cosmétiques a déjà diminué en Europe, mais elle a augmenté dans le domaine des biocarburants.
Sources : Greenpeace.fr - AFP Relax News