6 raisons pour lesquelles je ne ferai pas les soldes

Soldes
Soldes : 6 raisons pour lesquelles je ne ferai pas les soldes
Par Elodie-Elsy Moreau publié le
Rédactrice en chef
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Si j’aime la mode, je ne souhaite plus que la Terre en soit victime. Aujourd’hui, le textile est l’une des industries les plus polluantes. La meilleure manière pour inciter les marques à changer leurs comportements est peut-être… la riposte aux soldes.

Friperies, applis de vide dressing, cours de couture pour réparer ou transformer mes vêtements fétiches… le passage en mode slow fashion est bel et bien activé. Pas question donc de faire faire les soldes. Pourtant, le coup d’envoi a été donné mercredi dernier. Et comme à l’accoutumé, c’est la ruée dans les magasins. Malgré la foule, les clients tentent frénétiquement, et parfois même avec une pointe d’agressivité d’attraper cette robe, bien que sublime, fabriquée en Chine, suspendue sur le portant. Chacun essaie de se frayer un passage, à l’affût des étiquettes affichant les plus gros rabais… pour faire la "bonne affaire". Une effervescence qui fait aussi la joie des commerçants, ces derniers effectuant 20 % de leur chiffre d’affaires durant les soldes. Et cette année, pour eux, ils sont d’autant plus importants. Avec les mobilisations répétées des gilets jaunes, les ventes des dernières semaines ont dégringolé. Pour autant, si l’on prend en compte les impacts humains et environnementaux, l’industrie du textile file un mauvais coton, et nuit à notre belle planète. Voici 6 raisons pour lesquelles je boycotte les soldes. 

 

1. J’adopte la méthode BISOU… pour prendre soin de la planète

L’ONG Zero Waste relance sa campagne "rien de neuf cette année" pour inciter les consommateurs à réduire l’impact écologique de leurs achats. C’est aussi l’essence de la méthode BISOU. Celle-ci a été inventée par Marie Duboin Lefèvre et Herveline Verdeken. Elle consiste à se poser 5 questions fondamentales avant d’acheter un article. Ai-je vraiment Besoin de ce produit ? Le I fait référence à l’Immédiateté. Dois-je acheter cet article maintenant… ou puis-je attendre ? Ai-je déjà un objet Semblable ? Quelle est son Origine ? Cet objet me sera-t-il Utile ? Un questionnement essentiel quand on sait que depuis les années 2000, la production de vêtements a doublé. Plus de 100 milliards d’habits sont mis sur le marché chaque année… pour seulement 7 milliards d’individus (enfin, bon nombre n’y ont pas accès ou pas besoin). Une quantité incommensurable complètement absurde si l’on fait le calcul.

2. Mon armoire est à l’agonie… et la planète aussi

Qu’on aime ou pas la mode, on retrouve toujours dans ses placards des vêtements quasiment neufs, que l’on ne porte jamais. Petite confession : il m’arrive encore de retrouver des vêtements qui portent encore leur prix. C’est un signe clair : j’ai encore des pièces à user dans mon cher dressing qui est à bout de souffle !

3. Les modes passent et… reviennent

S’il ne reste que peu de place dans mes placards pour de nouvelles pièces, c’est aussi parce que j’ai tendance à garder précieusement mes affaires. Si Coco Chanel disait "La mode se démode, le style jamais", les tendances sont aussi cycliques. Je vous l’accorde, si l’on prie pour que pour certains looks ne refassent jamais surface, bien souvent, ils reviennent sur le devant de la scène. Alors qu’on la pensait complètement has been depuis la fin des années 1990, la banane est de retour depuis quelques mois, faisant fureur sur les catwalks. Quant à la jupe plissée qui cartonnait il y a quelques années, elle est de nouveau prisée. Moralité : je garde mes vêtements des années ou je vais piocher dans l’armoire de ma mère. Une excellente manière d’être en avance sur les prochaines collections ou d’être vintage et tendance. Elément que beaucoup oublient. Aujourd’hui, les consommateurs jettent deux fois plus de vêtements qu’il y a quinze ans. Il est temps de limiter ce gaspillage. Car si bon nombre d’habits finissent directement à la décharge, le recyclage a aussi (même s’il est moindre) un  impact environnemental.

4. Le textile est l’une des industries les plus polluantes au monde

Venons-en au point crucial. Le textile est le deuxième secteur le plus polluant au monde après celui du pétrole. D’après Isabelle Quéhé, fondatrice du salon Ethical Fashion Show, la mode émet 1,2 milliard de tonnes de gaz à effet de serre par an, plus que l’ensemble du trafic aérien et maritime réunis. De la production des matières premières, en passant par l’utilisation d’eau, des pesticides pour augmenter le rendement notamment pour le coton, la fabrication d’un tee-shirt lambda génère un coût écologique sans précédent. Pointant du doigt "les substances toxiques qu’utilisent les grandes marques" et "la pollution des cours d’eau causée par le rejet de produits toxiques dans les pays de fabrication de vêtements", en 2011, Greenpeace a lancé sa campagne Detox. Point positif : de nombreuses marques ont pris l’engagement d’éliminer certaines substances toxiques. Mais des problèmes subsistent. Aujourd’hui, le temps des collections printemps/été et automne/hiver n’existe plus : bienvenue dans le monde de la fast fashion où les griffes de prêt-à-porter multiplient les collections durant l’année, poussant à surconsommer et épuisant les ressources par la même occasion. Et quand elles n’arrivent pas à écouler leurs stocks, les enseignes envoient leurs produits neufs à l’incinérateur. Selon un article du New York Times, en 2017, H&M a accumulé pour 4,3 milliards de dollars d’invendus, soit 7 % de sa production, que le géant du textile a purement et simplement brûlé. Feu de joie… ou pas !

5. Mes vêtements achetés polluent déjà assez

C’est une pollution moins perceptible, dont les conséquences sont pourtant loin d’être anodines. Entretenir son linge (le laver, le repasser) nécessite de l’énergie. Pour des raisons économiques et écologiques, il est recommandé de privilégier le lavage à 30°. Une manière de réduire les émissions de CO2. Mais ce n’est tout. Chaque année, près de 500 000 tonnes de microplastiques se détachent de nos vêtements synthétiques. Non filtrés par les stations d’épuration, ils se retrouvent dans les océans. Cela représente près de 50 milliards de bouteilles en plastique... ingérés par les poissons et qui se retrouvent ensuite dans nos assiettes. Eh oui, aujourd’hui, toute la chaîne alimentaire est contaminée. En octobre 2018, une recherche menée par des chercheurs de l'Université médicale de Vienne et de l'Agence de l'environnement autrichienne révélait que les selles des individus contenaient des microplastiques. Certes, nos vêtements sont loin d’être les principaux responsables, mais ils participent aussi à cette pollution marine.

6. Les conditions de travail des ouvriers sont désastreuses

Autre question essentielle : les conditions de travail des petites mains qui confectionnent nos vêtements. Qui dit rabais et produits pas chers, dit aussi conditions de travail déplorables. Les marques choisissent de produire leurs collections dans des pays où la main d’œuvre est très bon marché (moins de 100 euros par mois). Ils ne se soucient pas véritablement du traitement des ouvriers par leurs sous-traitants. Le bien-être au travail est bien loin de leurs préoccupations. L'effondrement du Rana Plaza, en 2013, au Bangladesh, ayant causé plus d’un millier de décès en est la parfaite illustration. Plusieurs marques internationales de vêtements y avaient installé leurs ateliers de confection. Une catastrophe humaine démontrant les travers de l’industrie textile. Si les travailleurs sont souvent démunis, ils tentent progressivement de se soulever contre leurs conditions de travail. En effet, depuis début janvier 2019, au Bangladesh, des milliers d’ouvriers du textile travaillant pour des marques mondiales sont en grève pour réclamer de meilleurs salaires. Une cinquantaine d’usines ont dû suspendre leur activité en raison des manifestations. Car eux aussi en ont ras le bol de la fast fashion.

 

Ces marques qui ne font pas les soldes

C’est un fait. Les marques éthiques sont moins abordables que les griffes classiques. Pourtant, ce "surcoût" inévitable s’explique par une meilleure qualité des matières premières, une main d’œuvre mieux rémunérée et un respect des normes environnementales. Alors que la période des soldes représente 50 % des achats en France, certains tentent de résister… Une manière de ne pas inciter à la fièvre acheteuse. Des marques telles que Acoté, Loom, JULES & JENN ont choisi de ne pas faire de soldes. Dans un communiqué, cette dernière explique sa démarche : "De nombreuses marques de mode font fabriquer des collections spéciales pour les soldes, dans la plus stricte illégalité... " . Les créateurs, fervents adeptes du Consommer Moins, Consommer Mieux arguent qu’ils proposent "des prix justes et accessibles toute l’année".  Une mode également plus juste pour la planète.

Source(s):
  • Le Monde
  • Agence parisienne du Climat
  • Reporterre.net
  • Communiqué de presse JULES & JENN