Crise climatique et désir d’enfant : la touchante lettre d’une maman à son fils d’un an
A l’aube du premier anniversaire de son fils, une maman a publié sur Facebook une percutante lettre, relayée par le quotidien québécois La Presse, sur son désir de maternité "sur fond de fin du monde". Emouvant.
Faudrait-il faire un choix entre l’envie d’avoir des enfants et celui de sauver la planète ? Une question qui, semble-t-il, résonne jusqu’au sein de la monarchie britannique. Le prince Harry a récemment expliqué dans un entretien avec la primatologue Jane Goodall, pour le magazine Vogue, que ses convictions écologiques l’empêcheraient d’avoir une grande famille. L’an dernier, l’AFP a, de son côté, créé une controverse suite à la publication d’un graphique montrant que le fait d’avoir moins d’enfants était la solution la plus efficace pour limiter le réchauffement climatique. Des données issues d’une étude publiée en 2017 dans la revue scientifique Environmental Research Letters, remise toutefois en cause par certains experts. Malgré tout, de plus en plus de femmes (et d’hommes) sont convaincus qu’il est nécessaire de renoncer à devenir parents sauver la planète. Ou pour épargner les enfants d'un futur incertain, presque apocalyptique à l'heure où l'Amazonie est en proie à de terribles incendies. Mais si certains partagent cet avis, pour eux, le choix est impossible, à l’instar de Geneviève Dorval, chargée de projet dans un centre de réadaptation en dépendances, au Québec. Pour le premier anniversaire de son fils Léon, elle a publié une lettre touchante sur son désir de maternité en ces temps de crise climatique. Un texte à cœur ouvert dans lequel elle partage ses doutes mais aussi ses espoirs pour un avenir meilleur. Extraits.
"Nous avons décidé de faire un enfant sur fond de fin du monde"
"Tu es né durant la canicule l’été passé, et il y a eu un orage l’après-midi après que nous soyons revenus de la maison de naissance. C’était un moment puissant et irréel de te tenir dans mes bras. (…) Tu as été rêvé, désiré et attendu avec impatience, et tu es aimé profondément", commence-t-elle.
"Nous avons décidé de faire un enfant sur fond de fin du monde. Ce fut une décision douloureuse, pas entièrement éclairée, et totalement biaisée par notre envie profonde d’avoir un enfant. Pour tout te dire, nous ne réalisions pas la gravité de la situation quand j’étais enceinte de toi. Nous étions évidemment conscients des changements climatiques, mais ça semblait encore une réalité assez lointaine", poursuit la jeune maman.
"J’aimerais dire que nous ne savions pas, mais en fait nous étions aussi beaucoup dans le déni. Ta naissance a coïncidé avec le dépôt d’un rapport alarmant du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). C’est à ce moment que l’ampleur et l’imminence de la catastrophe me sont apparues pour la première fois. (…) Des records de température sont continuellement battus un peu partout dans le monde, et des feux de forêt sans précédents font rage. Les glaciers fondent à vue d’œil, menaçant de faire monter le niveau des océans. Les émissions de gaz à effet de serre continuent d’augmenter en flèche. À l’aube de ton premier anniversaire, il ne passe pas une semaine sans que de nouveaux rapports toujours plus alarmants soient publiés, et nous disent en gros que nous avons encore moins de temps que nous croyons pour éviter un point de non-retour et un emballement catastrophique du climat".
"Léon, l’avenir m’inquiète, et le présent me révolte. Mais je ne regrette pas de t’avoir mis au monde."
Elle confie : "J’ai commencé il y a quelques mois à vivre une anxiété envahissante. Insomnie, crises de larmes, émotions à fleur de peau, difficulté à penser à quoi que ce soit d’autre qu’un avenir sombre. Je suis parfois incapable de profiter du moment présent, ou d’apprécier pleinement le bonheur de te voir grandir sans avoir peur en même temps".
"Léon, l’avenir m’inquiète, et le présent me révolte. Mais je ne regrette pas de t’avoir mis au monde. Nous avons fait le pari que ta vie vaudrait la peine d’être vécue malgré tout, et que le monde se porterait mieux avec que sans toi. (…) En tant que mère, je vis beaucoup de culpabilité de ne pas pouvoir te garantir un environnement sain pour y grandir et peut-être y avoir ta propre famille un jour, si tu veux. Je n’ai pas de contrôle sur tout, mais je peux te faire certaines promesses. Je vais poursuivre les choix quotidiens visant à réduire l’impact de notre famille, bien que je reconnaisse que les actions individuelles ne suffisent pas et n’ont jamais suffi. (…) Je vais résister de mon mieux à la destruction du monde par la désobéissance civile", ajoute-t-elle.
Comme Geneviève Dorval l’indique sur Facebook, diffuser cette lettre avant de la transmettre à son enfant lorsqu’il sera en mesure de la lire et de la comprendre est une manière de faire "son coming out d’écoanxieuse". Il s’agit pour elle, d’un véritable manifeste personnel.
- Facebook Geneviève Dorval