Le maire du village le plus écolo de France désavoué par la justice

Le maire du village le plus écolo de France désavoué par la justice
Le maire du village le plus écolo de France désavoué par la justice
© Sebastien SALOM-GOMIS - AFP
Par Cécilia Ouibrahim publié le
Journaliste
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Le tribunal administratif de Rennes a ordonné ce mardi la suspension de l’arrêté anti-pesticides du maire de Langouët.

En mai dernier, Daniel Cueff, maire de la commune de Langouët, a décidé de prendre un arrêté municipal interdisant l’usage de produits phytopharmaceutiques près des habitations de la ville. Si la décision n’a pas fait l’unanimité, l’édile a pu compter sur le soutien des citoyens et de nombreuses associations. Malgré les encouragements, la justice a suspendu l’arrêté ce mardi. Mais le maire ne compte pas s’arrêter en si bon chemin.

Une décision illégitime pour un maire ? 

Le 18 mai 2019, le village le plus écolo de France a annoncé sa volonté de limiter l’épandage des pesticides à 150 m de toute habitation ou lieu de travail. Une mesure mise en place pour répondre aux "inquiétudes de la population qui revendique légitimement d'être protégée", justifiait le maire. Mais cette initiative a fait grincer des dents de nombreuses administrations publiques et instances politiques. Jugeant l’arrêté "entaché d'illégalité", la préfecture d’Ille-et-Vilaine a convoqué Daniel Cueff devant le tribunal administratif de Rennes. L’audience s’est tenue le 22 août dernier en présence de plusieurs ONG venues soutenir Langouët. Le juge des référés a finalement tranché ce mardi, soutenant qu’une telle mesure n’est pas dans les fonctions d’un maire. Dans une copie de cette décision, rendue publique mardi 27 août, le juge Pierre Vennéguès souligne "l’incompétence du maire de Langouët pour réglementer l’utilisation des produits phytopharmaceutiques sur le territoire de sa commune". Lors de l’audience du 22 août, Daniel Cueff a plaidé le principe de précaution. "C’est quoi le pouvoir d’un maire ? Un maire peut-il ignorer la santé de ses habitants ?" Et d’ajouter : "Une directive européenne impose depuis 2009 à la France de prendre des mesures pour protéger les habitants de l’épandage de pesticides, mais rien n’est fait". 

Devant le tribunal administratif de Rennes, où l'audience s'est tenue, ONG, élus et citoyens se sont mobilisés en masse pour témoigner leur soutien. 

“Pour protéger les habitants, il faut peut-être désobéir un peu”

Dans la foulée de la décision de justice, le maire de Langouët, qui a déclaré recevoir des "milliers de messages de soutien", a annoncé son intention de faire appel. "Pour faire bouger les lignes, pour protéger les habitants, il faut peut-être désobéir un peu", a-t-il considéré.

De nombreuses associations déplorent le verdict du tribunal administratif de Rennes. "Notre association ne peut que regretter ce jugement", a déploré François Veillerette, directeur de Générations Futures, dans un communiqué. "Nous invitons tous les maires de France à prendre des arrêtés similaires", poursuit-il. Pour renforcer son action, l’association prévoit de lancer prochainement une plateforme permettant d’interpeller directement leurs édiles. 

De son côté, la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA) a blâmé l'initiative de Daniel Cueff. "Chaque maire ne peut pas, comme ça, décider de lui même sur des sujets très complexes et qui relèvent de l'autorité de l'Etat", a fustigé Christiane Lambert, présidente de la FNSEA, ce mercredi sur Radio Classique. Selon elle, étendre cette interdiction à tout le territoire français risque "d'ensauvager" 15 % des terres et conduirait à une perte de revenus. Des solutions au "cas par cas" seraient préférables pour protéger les riverains, a-t-elle indiqué.

 

 

Photo : © Sebastien SALOM-GOMIS - AFP