Incendie de Rouen : "eau potable vérifiée" et "transparence du gouvernement" ?
Quatre jours après le spectaculaire incendie de l'usine Lubrizol à Rouen, Édouard Philippe s’est rendu lundi soir sur place pour tenter de rassurer une population toujours inquiète.
Les suites de l’incendie de l’usine Lubrizol, classée Seveso -autrement dit présentant des risques industriels majeurs- inquiètent les habitants. Depuis jeudi, cinq ministres ont fait le déplacement en Seine Maritime. Lundi soir, c’est Édouard Philippe qui s’est rendu sur place pour tenter d’apaiser une population dans le doute. S’il a déclaré qu’il "comprenait parfaitement l’inquiétude" des riverains, il a affirmé que les odeurs encore "gênantes" n’étaient "pas nocives". Il a par ailleurs promis "l'absolue transparence" du gouvernement. S'appuyant sur des analyses, le Premier ministre a assuré que "la qualité de l'air n'est pas en cause".
Sur l'origine de l'incendie, qui selon Lubrizol serait extérieure au site, Édouard Philippe a dit n'avoir "aucune information pour indiquer quelle hypothèse serait juste ou erronée".
Selon l'entreprise, "la vidéosurveillance et des témoins oculaires indiquent que le feu a tout d’abord été observé et signalé à l’extérieur du site de Lubrizol Rouen, ce qui suggère que l’origine du feu est extérieure à Lubrizol et que le feu s’est malheureusement propagé sur notre site". Dans un communiqué, le groupe précise travailler "avec les autorités locales afin de réaliser les tests environnementaux visant à assurer la sécurité des populations". Toutefois, nombre d’habitants attendent des réponses et jugent la situation dangereuse. Des enseignants de trois collèges ont fait usage de leur "droit de retrait", se disant "trop incommodés et trop inquiets des odeurs persistantes et des vomissements". "S"ils considèrent que c'est la bonne mesure à prendre j'entends leur réaction", a commenté Édouard Philippe.
Eau potable buvable ?
Après la diffusion lundi matin sur Twitter d'une vidéo montrant de l'eau noire s'écoulant d'un robinet de lavabo d’une habitation dite rouennaise, la Métropole de Rouen Normandie a rassuré la population sur la potabilité de l'eau des 71 communes de l'agglomération. "Aucune trace de contamination n’a été relevée", assure la collectivité dans un communiqué. "Les réservoirs d’eau potable de la Métropole de la rive nord, sur laquelle s'est concentré le panache de fumée, ont tous été vérifiés", souligne-t-elle.
Si les interrogations et l’inquiétude sont de mise, depuis l’incendie, de nombreuses fake news alarmantes circulent sur les réseaux sociaux. Photos et vidéos n’ayant aucun lien avec l’incendie de Rouen sont publiées. Autant d’éléments semant le doute. Dans la soirée, plusieurs centaines de manifestants scandant "on veut la vérité !" ont tenté d'entrer dans la salle où se tenait le conseil métropolitain de Rouen en présence du préfet. Ils ont été repoussés par la police sans incident.
Les agriculteurs, victimes collatérales
De nombreux agriculteurs ont vu leurs récoltes ravagées. Le ministre de l'Agriculture Didier Guillaume a promis une indemnisation totale aux professionnels dont la production est affectée par les retombées de suie de l'incendie de l'usine chimique. "Vous devrez être indemnisés en totalité, d'abord par des avances" de trésorerie, a déclaré M. Guillaume à des éleveurs laitiers, lors de la visite de leur exploitation à Bois-Guillaume, près de Rouen.
La récolte des cultures et des denrées alimentaires d'origine animale est interdite dans une centaine de communes en raison des retombées de suie occasionnées par le nuage. Le lait, le miel et les œufs d'élevage en plein air pondus depuis jeudi sont visés "jusqu'à l'obtention de garanties sanitaires sur les productions", selon des arrêtés préfectoraux. Par ailleurs, dès lundi, des prélèvements ont débuté dans l'Oise afin de "lever le doute" sur la présence éventuelle de produits chimiques dans les cultures.
"Les agriculteurs sont inquiets (...) La priorité est d'effectuer ces prélèvements pour lever le doute. Il peut y avoir des métaux lourds, des dioxydes, du plomb donc le principe de précaution s'applique pleinement", a déclaré Louis Le Franc, le préfet de l’Oise. Les premiers résultats sont attendus dans "environ une semaine".
"On veut être sûrs que nos produits soient sains. Mais on veut surtout que le monde agricole ne soit pas oublié et qu'on soit bien indemnisés si on détruit nos productions", a insisté auprès de l'AFP Régis Desrumaux, secrétaire général de la FDSEA de l'Oise, disant compter sur le soutien de l'Etat. Le Premier ministre s'est engagé de son côté à "accompagner" tous les agriculteurs de Normandie et d'autres régions.