Protéines animales : dans quels cas s’en passer peut-être problématique ? (Article 1)
Derrière la consommation des protéines animales, se cache la question de la consommation de viande, ou autre produit animal, une question bien d’actualité. Beaucoup tranchent – à tort - de manière catégorique, vantant ou fustigeant leur consommation, pour des raisons d’ordre physiologiques, économiques, environnementales ou encore philosophiques. On fait le point pour vous.
Les protéines animales sont surtout présentes dans la viande, le poisson, les œufs, dans le fromage. On peut aussi trouver des protéines dans les végétaux. Il y en a par exemple dans les fruits secs oléagineux, les légumineuses, le riz, le boulghour etc.
Du point de vue biochimique, les protéines sont de grosses molécules formées de chaînes de longueur variable d’acides aminés. L’organisme est capable de produire lui-même 16 acides aminés, à partir d’autres nutriments comme le glucose par exemple. Il doit en revanche impérativement trouver dans l’alimentation 9 autres acides aminés. Ces derniers sont dits « essentiels ».
Les 9 acides aminés essentiels sont : 3 AA « branchés » : Leucine, Isoleucine, Valine ; 2 précurseurs de neuromédiateurs : Tryptophane, Phénylalanine (précurseur de la Tyrosine) ; Lysine ; Méthionine ; Thréonine ; et Histidine que l’enfant ne sait pas fabriquer et que l’adulte fabrique en quantité insuffisante).
Quelle est la différence entre les protéines animales et les protéines végétales ?
Nous savons que les acides aminés qui composent les protéines sont assimilés au prorata de celui le plus manquant ! Si un acide aminé est présent à 50% de son ratio, ce sont aussi tous les autres acides aminés qui seront assimilés à 50%. Tous les aliments végétaux contiennent tous les acides aminés dont les essentiels, donc des protéines complètes, mais pas à 100% du ratio, contrairement aux protéines animales. Par exemple, dans les pois chiches il y a seulement 76 % de protéines complètes. Il est quand même possible de recevoir tous les acides aminés essentiels en mangeant une certaine quantité d’aliments végétaux riches en protéines. La quantité à consommer est dictée par le poids (chez un adulte en bonne santé entre 0.6 et 0.8 g/kg de poids corporel de protéines complètes). Le problème est que parfois, pour répondre à ses besoins en acides aminés, il peut être difficile de le faire sans consommer de protéines animales, même en faisant des associations de céréales et légumineuses au cours d’un même repas, de manière à ce que leurs acides aminés se complètent et atteindre 100% du ratio.
Que se passe-t-il si l’on ne reçoit pas suffisamment d’acides aminés essentiels ?
Les protéines sont essentielles au fonctionnement du corps humain. Elles sont le matériau de base des muscles (notre chair), des os (notre charpente) mais aussi des ongles, des cheveux, de la peau… Bref de toute notre matière. Elles sont aussi le matériau de base du réseau de communication de notre corps : les hormones, les neurotransmetteurs mais aussi des molécules qui catalysent les réactions comme les enzymes et les anticorps… Elles peuvent même être des sources d’énergie lorsque notre corps ne reçoit pas suffisamment de glucose (sucre) ou graisses (corps gras ou corps cétoniques) pour fonctionner. Sans apport protéique, notre corps va puiser dans ses propres réserves, soit dans les muscles. Cela affaiblit la masse musculaire mais aussi le système immunitaire car ces cellules ont un besoin important en protéines pour se multiplier et attaquer. Nos muscles sont leur source privilégiée. Toute perte de muscle, même seulement de 10%, affaiblit notre système immunitaire, qui se montre alors moins réactif aux attaques ennemies, pour nous protéger. Toute perte de masse musculaire, en cas de pathologie ou inéluctable avec le temps si on ne l’entretient pas, pousse aussi l’organisme dans un état inflammatoire chronique, qui devient incapable de lutter face aux agressions quotidiennes d’une vie normale.
Un troisième lien existe aussi. C’est celui entre masse musculaire et masse osseuse. Notre santé osseuse dépend de notre force[1] [2] [3].
Dans quels cas se passer de protéines animales peut poser problème ?
- Pour ceux qui ne souhaitent pas contrôler finement leur alimentation. Devenir végétarien c’est se passer de protéines animales, mais faire en sorte de recevoir suffisamment de protéines végétales en contrepartie et de vitamine B12, vitamine absente du règne végétal et qui joue un rôle clé dans le fonctionnement énergétique, le système nerveux, immunitaire, etc.
- Pour les personnes dénutries (qui ont perdu du muscle suite à une maladie), les personnes souffrant d’ostéoporose, qui ont un syndrome inflammatoire fort, une grande plaie à cicatriser et celles de plus de 65 ans (avec le vieillissement, la synthèse des protéines par le corps est moins efficace). L’apport en protéines doit alors être d’environ 1 g/kg/jour. Cet objectif n’est pas toujours facile à atteindre avec simplement des protéines végétales. Même le professeur Valter Longo, gérontologue reconnu, qui recommande une alimentation à base de protéines d'origine végétale (légumineuses, soya, arachides), insiste sur le fait qu’il faut intégrer des protéines animales après 65 ans de façon à augmenter l'apport en protéines.
- Si vous avez de grands besoins en protéines et que votre poids ou votre état de santé nécessite que vous suiviez un régime pauvre en glucides (low carb ou cétogène) car les aliments riches en protéines végétales sont aussi pour la plupart très riches en glucides.
- En cas de dépression. Une étude de corrélation (pas de causalité), menée auprès de 49 889 participants a révélé des scores de dépression plus élevés chez les participants végétariens par rapport aux omnivores. Des carences en causes ? [1] On sait par exemple qu’une carence en B12, vitamine qui sert dans la régulation de l’humeur, peut jouer un rôle. Le déséquilibre entre oméga-3 et oméga-6, à la faveur des oméga-6 pourrait aussi entrer en jeu. Trop d’oméga-6 pourrait altérer la santé mentale. Pas assez d’oméga-3 aussi. Or les végétariens ne consomment pas de poisson gras (meilleures sources d’oméga-3) et beaucoup de graines (riches en oméga-6).
Évidemment si pour des questions de conscience, économiques, vous ne souhaitez pas consommer de produits animaux, ne les intégrez pas. Retenez simplement que vous devrez être alors extrêmement vigilent sur la façon de composer vos repas et éventuellement prendre une supplémentation (oméga-3, B12, protéines pures de chanvre) pour atteindre vos besoins.
Les livres à lire
Valter Longo. Le régime de la longévite. Actes Sud.
Magali Walkowicz 30 plats végé céto. Thierry Souccar Editions.
[1]Sebastian Ocklenburg. Vegetarian diet and depression scores: A meta-analysis et al. Journal of Affective Disorders.
Volume 294, 1 November 2021, Pages 813-815
[1] Torres-Costoso A1, Gracia-Marco L, Sánchez-López M, García-Prieto JC, García-Hermoso A, Díez-Fernández A, Martínez-Vizcaíno V. Lean mass as a total mediator of the influence of muscular fitness on bone health in schoolchildren: a mediation analysis. J Sports Sci. 2015;33(8):817-30. doi: 10.1080/02640414.2014.964750
[2] Gutin B1, Kasper MJ. Can vigorous exercise play a role in osteoporosis prevention? A review. Osteoporos Int. 1992 Mar;2(2):55-69.
[3] Nelson ME1, Fiatarone MA, Morganti CM, Trice I, Greenberg RA, Evans WJ. Effects of high-intensity strength training on multiple risk factors for osteoporotic fractures. A randomized controlled trial.
JAMA. 1994 Dec 28;272(24):1909-14.