Du glyphosate dans du miel : des apiculteurs portent plainte contre Bayer
Le syndicat apicole de l'Aisne a porté plainte mercredi contre Bayer, qui vient de boucler le rachat de Monsanto, après la découverte de glyphosate dans le miel d'un de ses adhérents, a-t-on appris vendredi de sources concordantes.
Le syndicat, réunissant 200 apiculteurs pour la plupart amateurs, a reçu l'alerte d'un de ses membres qui vend ses excédents au groupe Famille Michaud Apiculteurs, le plus gros acteur du miel en France, notamment avec sa marque Lune de Miel.
Le miel est systématiquement analysé
"Lorsqu'ils reçoivent le miel, ils le font systématiquement analyser et là ils ont trouvé du glyphosate", explique à l'AFP Jean-Marie Camus, président du syndicat apicole de l'Aisne, confirmant une information du quotidien Le Parisien-Aujourd'hui en France.
Interrogé par l'AFP, Famille Michaud Apiculteurs a confirmé lui avoir refusé trois fûts de miel toutes fleurs, d'un total de 900 kg, après y avoir détecté des traces de l'herbicide - le plus utilisé en France et qualifié de "cancérogène probable" par l'Organisation mondiale de la santé - à hauteur de "16 ppb" (parties par milliard).
"La règlementation glyphosates est européenne, elle fixe une limite maximale de 50 ppb pour le miel et les produits de la ruche", a précisé à l'AFP Vincent Michaud, PDG du groupe, qui refuse "systématiquement" d'utiliser du miel quand le taux de glyphosate y dépasse le seuil de 10 ppb.
"Notre politique qualité est plus exigeante (...) car nous considérons que le miel doit rester un produit 100% pur et naturel, totalement préservé, et que la pureté et la qualité d'un miel doivent systématiquement être contrôlées avant la commercialisation", a fait valoir M. Michaud.
Plainte déposée pour "administration de substances nuisibles"
L'apiculteur concerné habite près de Laon, une région de grandes cultures (colza, betterave, tournesol, luzerne). "Mais il ne faut pas non plus oublier le jardinier du dimanche et sa propension à utiliser facilement le Roundup", nom commercial de l'herbicide, souligne l'avocat du syndicat, Me Emmanuel Ludot, du barreau de Reims.
La plainte a été déposée jeudi pour "administration de substances nuisibles" contre Bayer et Monsanto, dont le siège en France est à Lyon, une date choisie symboliquement "pour la faire coïncider avec deux événements: une action nationale des apiculteurs et le rachat définitif de Monsanto par Bayer", a souligné Me Ludot.
Jean-Marie Camus espère que cette action conduira à l'ouverture d'une enquête permettant de savoir, notamment, si cette contamination est accidentelle ou pas et quelles conséquences elle pourrait avoir sur la santé des consommateurs. Il a conservé les trois fûts de miel mis en cause.
"La question est aussi de savoir quelle est l'étendue du phénomène. Famille Michaud m'a dit qu'il ne s'agissait pas d'un cas isolé", a ajouté Me Ludot.
Des traces régulières de glyphosate
Tous les miels livrés au groupe par des apiculteurs français sont analysés et "régulièrement, nous détectons des substances exogènes dont le glyphosate", a confirmé Vincent Michaud, précisant que sur la récolte 2018, le taux de contamination au glyphosate était de 12% parmi les lots fournis au groupe en France et que le nombre d'apiculteurs auxquels il avait demandé de récupérer leur livraison était de sept.
"Régulièrement, nous détectons des substances exogènes dont le glyphosate", confirme Vincent Michaud
Parmi les autres substances souvent détectées, M. Michaud cite des sirops de nourrissement ou des antibiotiques destinés aux abeilles, et des pesticides.
Des apiculteurs ont manifesté jeudi un peu partout en France pour réclamer des aides exceptionnelles et un environnement plus favorable aux abeilles, après "l'hécatombe" dans les ruches cet hiver.