Le poumon vert de la planète... à bout de souffle

forêt amazonienne
Le poumon vert de la planète... à bout de souffle
© Stocklib
Par Elodie-Elsy Moreau publié le
Rédactrice en chef
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Une étude réalisée par une équipe internationale, publiée le 29 avril dernier dans la revue scientifique Nature Climate Change, révèle que l’Amazonie brésilienne rejette désormais plus de carbone qu’elle n’en absorbe. Une situation inédite et préoccupante.

L’heure du basculement a-t-il sonné ? Selon une étude réalisée par une équipe internationale associant des scientifiques de l’Institut français de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAE), du Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) et de l’Université d’Oklahoma, et publiée le 29 avril 2021 dans la revue scientifique Nature Climate Change, l’Amazonie a rejeté, ces dix dernières années, plus de carbone qu’elle n’en a absorbé. C'est la première fois que cela se produit. 
Pour dresser ce constat, les chercheurs ont combiné des observations satellitaires de la biomasse végétale et de surveillance de la déforestation.

Les forêts : des lieux précieux contre le réchauffement climatique

Les forêts absorbent entre 25 et 30 % des gaz à effet de serre émis par l’être humain, permettant ainsi de réduire les effets du changement climatique. La forêt amazonienne représente la moitié des forêts tropicales de la planète. Et la partie brésilienne constitue 60 % de cette forêt primaire communément appelée le poumon vert de la planète. Pourtant, celle-ci est en souffrance, et joue de moins en moins son rôle de réservoir et de stockage de carbone. Entre 2010 et 2019, l’Amazonie brésilienne a perdu plus de carbone qu’elle n’en a gagné : 18 % d’après le communiqué de l’Inrae. « C’est la première fois qu’on a des chiffres qui montrent qu’on a basculé et que l’Amazonie brésilienne est émettrice » nette de carbone, souligne l’un des auteurs de cette recherche, Jean-Pierre Wigneron, chercheur à l’Inrae.
Pour l’instant, « les autres pays compensent les pertes de l’Amazonie brésilienne » et « l’ensemble de l’Amazonie n’a pas encore basculé, mais elle pourrait le faire bientôt ». Car si « jusqu’à présent, (…) les forêts tropicales nous protégeaient en permettant de freiner le réchauffement, notre dernier rempart, l’Amazonie, est en train de basculer », avertissent les chercheurs.

Les dégradations humaines, l’autre cancer du poumon vert

La déforestation contribue indéniablement à la destruction de la forêt. « L’étude montre une nette augmentation de la déforestation en 2019 (3,9 millions d’hectares), qui est 30 % supérieure à celle observée en 2015 lors de l’épisode de sécheresse extrême d’El Niño, et qui est multipliée par 4 par rapport aux années 2017 et 2018 ». Mais ce sont surtout ce que les scientifiques appellent « les dégradations », liées à la déforestation, qui perturbent cet écosystème. Celles-ci ont un impact trois fois supérieur à la déforestation. Selon l’étude, elles ont contribué à 73 % des pertes de carbone, contre 27 % pour la déforestation, qui atteint pourtant des sommets. Cela comprend les arbres fragilisés en bordure des zones déforestées, les coupes sélectives, les petits incendies. La sécheresse causant la mort des arbres est aussi responsable. L’effet de ces éléments est plus difficile à analyser que la déforestation pure et simple. Pourtant, ils contribuent fortement à diminuer l’effet puits de carbone de l’Amazonie. 

Pendant ce temps, Bolsonaro joue la carte écolo

Alors que les scientifiques ne cessent d’alerter sur ce désastre à venir, les actions gouvernementales restent insuffisantes voire inexistantes. Six militants de la lutte contre le réchauffement climatique ont lancé une action en justice contre le gouvernement brésilien, le mois dernier, pour avoir revu à la baisse ses engagements de réduction des émissions de gaz à effet de serre dans le cadre de l'Accord de Paris. Pour rappel, sous la pression des pays européens, Jair Bolsonaro, président brésilien élu en 2019, a renoncé à quitter l’accord mondial sur le réchauffement climatique… sans le respecter.
Toutefois, le chef d’État verdit depuis peu son discours. Lors du sommet climat présidé par Joe Biden, qui s’est tenu à distance, le 22 avril avril dernier, Jair Bolsonaro a évoqué la "responsabilité collective" dans la lutte contre le réchauffement du climat. Il s’est aussi engagé à mener diverses actions pour le réduire, tout comme la destruction de l’Amazonie, et a recherché un financement américain à cet effet. Un discours qui tranche avec ses prises de position passées. Le leader d'extrême droite est en pleine opération séduction auprès du nouveau président américain qui, pendant sa campagne électorale, l’avait menacé de "conséquences économiques significatives" s'il ne faisait pas cesser la déforestation. Tiendra-t-il son nouvelle ligne (verte) de conduite ? Rien n’est moins sûr…

Les dégradations humaines, l’autre cancer du poumon vert

La déforestation contribue indéniablement à la destruction de la forêt. « L’étude montre une nette augmentation de la déforestation en 2019 (3,9 millions d’hectares), qui est 30 % supérieure à celle observée en 2015 lors de l’épisode de sécheresse extrême d’El Niño, et qui est multipliée par 4 par rapport aux années 2017 et 2018 ». Mais ce sont surtout ce que les scientifiques appellent « les dégradations », liées à la déforestation, qui perturbent cet écosystème. Celles-ci ont un impact trois fois supérieur à la déforestation. Selon l’étude, elles ont contribué à 73 % des pertes de carbone, contre 27 % pour la déforestation, qui atteint pourtant des sommets. Cela comprend les arbres fragilisés en bordure des zones déforestées, les coupes sélectives, les petits incendies. La sécheresse causant la mort des arbres est aussi responsable. L’effet de ces éléments est plus difficile à analyser que la déforestation pure et simple. Pourtant, ils contribuent fortement à diminuer l’effet puits de carbone de l’Amazonie. 

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