Renoncer à avoir des enfants par conviction écologique, elles l'ont fait !
Au nom de la planète et de la surpopulation galopante, des femmes mais aussi des hommes font parfois le choix de ne pas avoir d’enfants par conviction écologique. Ils font partie du mouvement des “sans enfants par choix” ou “childfree”. Certaines femmes ont bien voulu témoigner pour nous.
Alors que la France a le taux de natalité le plus élevé en Europe (1,93 enfant par femme en 2016), 6.3% des hommes et 4.3% des femmes en âge d’avoir des enfants ont fait le choix de ne pas en avoir, soit 5% des Français selon une étude de l’INED en 2010. Ces “childfree” peuvent être motivés par diverses raisons : absence d’instinct maternel ou paternel, infertilité, difficulté pour rencontrer l’âme sœur, pas d’attrait pour la vie familiale. Avec la maîtrise de la contraception et l’autonomie financière, les femmes peuvent désormais choisir leur vie et décider de vivre une vie sans enfant. Mais, contrairement à ce que les préjugés pourraient nous laisser penser, les personnes qui ne souhaitent pas d’enfants ne le font pas par égoïsme mais bien par sens des responsabilités. Nous le savons nos actes ont des impacts et avoir des enfants aussi.
Au nom de la surpopulation galopante
Chaque année, l’institut de recherche internationale Global Footprint Network nous alerte sur le fait que l'humanité consomme les ressources d’une planète et demie par an. “Le Jour du dépassement de la Terre” progresse toujours plus vite et la planète vit de plus en plus tôt à crédit. Il faudrait d’ailleurs 1,7 fois la France pour nourrir les Français.
C’est ce genre de statistiques qui font réagir les GINKs, les “Green Inclinations, No Kids” (Sensibilité écologique, pas d’enfants) qui sont convaincus que la surpopulation de la planète a un effet considérable sur le réchauffement climatique. Par leur choix de ne pas avoir d’enfants, elles souhaitent soulager la Terre de la surpopulation. Interrogée par TV5Monde, l’Américaine Lisa Hymas, éditorialiste au Huffington Post et co-fondatrice du site politico-écolo grist.org avait déclaré : “la maternité devrait être mieux réfléchie. Il s’agit d’un choix qui va au-delà d’un besoin personnel, voire égoïste, mais qui doit aussi prendre en compte l’intérêt de tous.”
Pour ces femmes, difficile de se reproduire à l’infini dans un espace fini : “Comment peut-on assurer la survie humaine sur notre petite planète ? Je ne peux concevoir qu’avec une démographie croissante sur long terme, notre planète puisse contenir tout ce monde”, m’explique Laurence, “childfree” de 38 ans par choix personnel et “écolonomique” comme elle aime expliquer. Pour Mary, “childfree” de 30 ans, l’état de la planète est trop préoccupant pour assurer un avenir serein à ses enfants : “L’état de la planète s’est incroyablement détérioré : disparition d’espèces, pollution massive des océans, épuisement des terres, déchets qui s’accumulent toujours plus, changement de climat et multiplication des catastrophes naturelles. Je n’assumerai pas de voir mon enfant souffrir, comme cela m’est arrivé en constatant la triste réalité du comportement humain. Je nous vois comme des parasites ayant colonisé une Terre qui ne nous appartient pas. Je suis pour la décroissance et à mon avis, la meilleure chose que je puisse faire pour la planète, c’est de ne pas avoir d’enfant”.
“Tu dis ça maintenant mais tu changeras d’avis"
“Égoïstes”, “immatures”, “tu verras dans quelques années”, “tu ne veux pas donner un sens à ta vie”, “ça finira par passer”, “une femme sans enfant n’est pas épanoui”. Aujourd’hui, les femmes qui font le choix de ne pas avoir d’enfant sont systématiquement jugées. “Bien souvent, des jeunes parents rejettent ceux qui décident de ne pas avoir d’enfants. Ces personnes leurs font sentir qu’ils ne rentrent pas dans le moule”, déplore Ingrid. Au quotidien, Sandrine vit ses choix sereinement mais a été contrainte de rompre les liens avec sa famille, “j’ai coupé les ponts puisqu’ils n’acceptaient pas mon choix car une femme se doit d'avoir des enfants”.
Sur son blog Tout va mieux, Julie parle de cette absence d'envie d'être mère et de la pression sociale qui entoure la parentalité. Sa planche de BD à lire ici.
La parentalité est un sujet sensible. Encore plus en ces périodes de crise, où l’enfant - ce petit être innocent - devient une valeur refuge. Certains experts ont d’ailleurs soulevé le problème de l'idéal maternel. En effet, la pression sociale sur les femmes est si forte que peut en découler un sentiment d'incapacité à prenre en charge le rôle du parent responsable. Laurine a 26 ans et est en couple depuis 3 ans avec son compagnon: “La question du monde qu'on aura à leur offrir est très ancrée dans notre esprit même si on fait de son mieux pour qu'ils aient une vie saine et heureuse” avant d’ajouter avec pessimisme : “faire un enfant en ayant connaissance de ce qu’il se passe actuellement dans le monde, ce serait comme choisir un innocent au hasard, lui donner une arme en lui disant “hé toi là-bas, va lutter au front !”, cela ne me paraît pas juste”, s’inquiète-elle.
L’adoption, la solution “responsable” ?
Les childfree refusent que les femmes soient formatées dès l'enfance à un rôle de mère ou que la maternité soit un frein à l'épanouissement personnel. “Et si je devais faire comme tout le monde parce que oui, la triste réalité fait que beaucoup de couple font des enfants aussi par pression sociale, et bien aujourd'hui, je me retrouverais comme un bon nombre de femmes, maman solo à trimer pour survivre”, m’explique Ingrid, 32 ans. La liberté, la flexibilité des horaires et de planning, l’absence de frein à sa carrière professionnelle, la pratique d’un sport, la réalisation à plein temps d’une passion, le temps pour soi et pour les autres (notamment à travers un engagement humanitaire ou social) sont autant d’avantages énumérés par les childfree.
Mais, toutes ne sont pas sévèrement réfractaires à la maternité. Pour les femmes engagées mais désireuses d’être mère, il y a la solution de l’adoption. “Pourquoi faire “son” enfant alors que des milliers d’enfants sont à la recherche d’une famille ?”, interroge Laurence. Quant à Mary, elle préfère se dévouer aux autres enfants plutôt qu’aux siens : “Je suis animatrice socioculturelle, je préfère ne pas faire d'enfants pour mieux m'occuper de ceux des autres, et ainsi, tenter de leur transmettre des valeurs qui me semblent importantes pour leur avenir, pour une société plus juste et responsable”. Et, dans le cas où l’envie de devenir mère pointerait le bout de son nez : “je préférerais me tourner vers l'adoption”.