Slow-tourisme : cet été, ils ralentissent

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Slow tourisme
© Stocklib
Par Claire Villard publié le
Journaliste indépendante

Après la crise sanitaire, ils ont changé leur façon de voyager. Contraints de partir moins loin, moins longtemps, d’utiliser des transports plus doux, ils se sont mis malgré eux, mais non sans un certain plaisir, au slow-tourisme. Témoignages.

Pour certains d’entre nous, voyager ne peut se concevoir qu’en mode « slow », c’est-à-dire en réduisant au maximum notre empreinte carbone, en allant moins loin, en se déplaçant de manière plus douce, en prenant le temps de regarder ce qui se trouve autour de nous plutôt qu'en collectionnant les destinations. D’autres personnes, au contraire, ont découvert ce mode de voyage plus réfléchi en conséquence de la pandémie de Covid-19.

La campagne auvergnate, plutôt que l’étranger

C’est le cas de Anne, 53 ans, domiciliée à Bordeaux. Chaque année, avec son mari, elle explore un pays différent : Irlande, Maroc, Écosse, Italie, Égypte, États-Unis... « Mais cette année, l’étranger me fait un peu peur, avoue-t-elle. Je connais des personnes qui sont restées bloquées dans un pays plusieurs semaines à cause de la crise sanitaire. On sait quand on part mais on ne sait pas trop quand on revient ! » Face à ces incertitudes, le couple a décidé de rester en France cette année, en réservant un logement dans le Cantal. « On avait envie de vert, et de ne pas voir trop de monde. Je n’ai jamais trop aimé la foule, mais ce besoin de nature s’est vraiment amplifié avec la Covid. » Anne se laisse aussi une certaine souplesse sur le programme de cette semaine en Auvergne. « La seule chose que nous avons prévu, c’est de faire un restaurant trois étoiles ! Ensuite, certainement des petites randonnées, et simplement passer du temps tranquille. » Si ses vacances 2021 seront très « slow », Anne ne compte pas pour autant renoncer complètement à explorer le monde, elle qui « rêve depuis longtemps des Seychelles » et se verrait tout à fait s'offrir un séjour au Japon. « Mais depuis quelque temps, mon mari se questionne sur le transport aérien. On adore voyager, mais notre conscience écologique nous fait réfléchir. »

Un tour des amis en France

Maud, quant à elle, profite cette année de la crise sanitaire pour réaliser un vieux projet : une grande randonnée en France à vélo. « J’avais pourtant prévu d’accompagner mon compagnon dans sa famille en Tunisie. J’ai beaucoup hésité avant d’y renoncer. Mais j’avais peur de devoir rester coincée là-bas, et que sur place il n’y ait pas grand chose à faire. Si c’est pour rester deux semaines enfermée dans une maison, pas question ! », explique la Toulousaine de 33 ans. Finalement, elle a choisi l’option sport et copains. « J’étais déjà partie plusieurs jours à vélo à deux l’an dernier et j’avais très envie de recommencer, seule cette fois-ci. Je me suis dit que ce serait l’occasion d’aller voir des amis dans plusieurs endroits de France, où je ne vais pas forcément souvent. J’ai tracé mon itinéraire, complété mes équipements, et j’ai hâte de partir. D’autant que je peux prendre mon temps à chaque étape, rester chez les uns ou chez les autres deux ou trois jours, avant de repartir. En somme, faire un peu au jour le jour et selon l’humeur du moment...et selon la météo aussi ! »

Le regard d’un « slow-traveller » aguerri

Maud est loin d’être la seule à passer ses vacances d’été à deux roues. Mathieu Mouillet, « globe-trotter lent » depuis plus de quinze ans*, fait remarquer qu' « il existe un engouement pour le vélo et les mobilités douces qui fait plaisir à voir. Les itinéraires à vélo rivalisent pour booster leur visibilité sur les réseaux sociaux. Les groupes dédiés aux voyages à vélo explosent », poursuit-il. Cependant, il a constaté un autre phénomène, aux antipodes des valeurs prônées par le slow tourisme : « je vois des voyagistes qui envoient des newsletters "retour à la case départ" et proposent des séjours courts à l’autre bout de la planète, après nous avoir parlé d’écologie pendant un an… » Car, les envies impulsives de voyages dépaysants façon bulle d’oxygène, pour couper rapidement et efficacement avec le quotidien, ont bel et bien fait partie des conséquences, elles aussi, de la crise sanitaire.

De son côté, Mathieu a tout simplement arrêté de voyager avec le Covid. Un temps qu’il a mis à profit pour écrire le récit de son tour du monde à vélo réalisé vingt ans plus tôt. En attendant sa parution, son premier livre, « La diagonale du vide, un voyage exotique en France », dans lequel il raconte son « road-trip à 4km/ heure » dans la France rurale, sera une excellente lecture de (slow) vacances pour cet été.

 

* Ses carnets de voyage et ses réflexions sur le slow tourisme sont à retrouver sur son blog.